"Le ministre Wouter Bos (Finances) critique la manière dont la France traite les règles budgétaires européennes", relève le journal d?affaires Het Financieele Dagblad (p.7). "Durant son entretien hebdomadaire sur la chaîne de télévision RTL Z, Bos a déclaré mardi que les Français ?n?ont cure des règles européennes?."
Les dépenses publiques et la dette d?Etat françaises, poursuit le quotidien, " sont parmi les plus élevées de l?Union européenne". "L?assainissement de la forte dette et du déficit budgétaire en France s?est ralenti l?an dernier. Les Etats membres de l?UE se sont accordés sur la réduction des déficits budgétaires et Bos estime que la position de Paris n?est pas admissible. Il en parlera à son homologue français la semaine prochaine, lors d?une réunion des ministres européens des Finances."
"Bos a aussi l?intention de prier une nouvelle fois ses collègues de ne pas se prononcer sur la politique de la Banque centrale européenne (BCE). C?est surtout son homologue français qui devrait s?exprimer moins, selon Bos. La BCE est indépendante et définit la politique monétaire européenne. Bos est d?avis que les politiques ne doivent ?pas donner l?impression? qu?ils peuvent exercer une influence sur cette institution. Les Français, de gauche comme de droite, critiquent fréquemment la politique de la BCE, qui serait trop unilatéralement centrée sur la lutte contre l?inflation. Paris veut que la BCE, en abaissant les taux d?intérêts, stimule la croissance et l?emploi dans l?UE."
Le journal financier, pour finir, rappelle que le premier ministre François Fillon, dans une interview accordée au Financial Times, a récemment déclaré que son gouvernement voulait geler les dépenses publiques durant les cinq prochaines années.

Mais qu'a donc fait notre cher Président de la République pour que ministre des finance des Pays-Bas lui remonte ainsi les bretelles ? On Sait que Nicolas Sarkozy critique régulièrement la politique de la Banque Centrale Européenne (BCE) pour la politique de taux d'interêt qu'elle pratique. Il affirme que les taux d'intérets sont trop élevés et que l'euro est surévalué. Ceci nuit à la compétitivité de nos entreprises à l'exportation. C'est à cause de cela qu'elles n'embauchent pas et que le chomage reste élevé en France. Ce n'est pas le seul à dire ça, beaucoup de français pensent la même chose ce qui fait que l'ensemble des candiats à l'élection présidentielle de 2007 étaient d'accord sur ce point. Ce qui ne plaisait pas à Jean Claude Trichet, le président de la BCE[1].

D'après les chiffres du ministère des finances[2], 49% des exportations de la France se font vers la zone euro avec laquelle le taux de change n'a pas d'influence. Je vois bien l'euro apporter une stabilité pour la moitié de nos exportations mais j'ai beaucoup plus de peine à le voir responsable du taux de chomage de la France. D'ailleurs, je vis dans un pays qui a aussi l'euro pour monnaieet un taux de chomage de 5%. Pourquoi l'euro pénaliserait l'emploi en France mais pas aux Pays-Bas ni en Allemagne ? On voit bien que sur ce thème notre président a tout faux.

Comme souvent quand on a tord, on répète à l'envi qu'on a raison. Lorsque la crise des subprimes a éclaté cet été, les banques ne s'accordaient plus de crédit par manque de confiance. La BCE a don injecté des liquidités sur le marché interbancaire. Nicolas Sarkozy a critiqué cette action en disant: «on a fait des facilités pour les spéculateurs, on complique la tâche pour les entrepreneurs.» reprochant à la BCE d'avoir «injecté des liquidités sans baisser les taux». Or c'est bien ce qu'il fallait faire, les banques étaient en train de paralyser le marcher du crédit dont les entrepreneurs ont besoin, la BCE tente de le le fluidifier en apportant de l'argent disponible. Baisser les taux aurait justement été un soutien aux spéculateurs en abaissant le coût de leur opérations douteuses[3].

Voilà donc pourquoi Wouter Bos en veut au gouvernement actuel de la France. L'une de ses premières mesures est une somme d'exonérations fiscales de plus de 13 milliards d'euros surtout à destination des riches[4]. 13 milliards de recettes fiscales en moins alors que la France doit réduire son déficit budgétaire. Après avoir balancé cette nouvelle à la gueule des partenaires européens, Nicolas Sarkozy la ramène pour que la BCE baisse son taux directeur alors que, on l'a vu plus haut, cette menure n'est pas justifiée. Wouter Bos a raison de ne pas être content et d'affirmer haut et fort que la France fait n'importe quoi.

Là ou Wouter Bos à tord c'est sur l'indépendance de la BCE. Certes, la banque centrale définie la politique monétaire de la zone euro. Mais cette politique monétaire doit être coordonnée avec la politique budgétaire, économique et fiscale de chaque gouvernement. C'est pour cela que les ministres des finances de la zone euro se réunissent régulièrement et c'est pour cela que leurs décisions doivent aller dans le même sens. Or il serait bienvenu que l'eurogroupe prenne un peu ses responsabilités et définisse une politique économique et fiscale commune. Les gouvenements seraient alors plus enclins à demander à la BCE d'appliquer une politique monétaire en cohérence avec leurs choix[5].

Notes

[1] voir Trichet répond à Sarkozy et à Royal sur l'euro

[2] Leur étude est ici.

[3] Sur ce sujet précis lire Trichet:1 Sarkozy: 0

[4] Il y a eu beaucoup de débats sur les riches et le paquet fiscal. Je ne rentrerais pas dans le détail.

[5] L'Eurogroupe a été créé à Amsterdam en 1997 mais ne figure même pas dans le traité